Comment bien mener une session d’improvisations chez Toastmasters ?

  • Dossier rédigé par Franck Buscaja 

Guide pratique pour les clubs Toastmasters qui sont à cours d’idées ou dont les membres fuient la session d’improvisations.

L’improvisation chez Toastmasters 

La méthode Toastmasters a une tradition selon laquelle tous les membres d’un club parlent à chaque réunion. Pendant la session d’improvisation les membres ou visiteurs n’ayant aucun rôle ont l’opportunité de prendre la parole pendant une à deux minutes, ce qui permet de suivre la tradition. Cependant, lors de mes visites à des clubs dans les quatre coins du monde, j’ai remarqué que cette session était considérée comme une réelle contrainte. Quelle a été ma surprise ! Dans notre club Les Ailes à Paris, nous l’apprécions énormément ; si bien, que nous avons instauré des réunions totalement dédiées aux improvisations !

S’il est normal d’avoir une certaine appréhension et peur de l’inconnu, il n’est cependant pas commun chez Toastmasters de manquer une occasion de s’améliorer à l’oral. J’ai constaté deux autres causes à cette situation :

  • Soit les membres ne voient pas l’intérêt de cet exercice,
  • Soit la session est ennuyeuse ou les sujets sont trop difficiles.

L’importance de l’improvisation 

L’improvisation aide à développer notre flexibilité, qui est l’une de nos 15 compétences émotionnelles. Elle favorise le développement de notre agilité comportementale. Il est impossible de tout prévoir dans notre journée ou projet, mais ce que nous pouvons maîtriser est notre capacité de s’y adapter. L’incertitude fait partie intégrante de la session. Les improvisations nous exercent à garder notre calme, à se concentrer sur le moment présent, à s’ouvrir au changement, à construire avec le groupe et aiguiser notre capacité de rebondir.

Pour en savoir plus sur la flexibilité, vous pouvez regarder cette vidéo de Sophie Muffang.

https://youtu.be/2Zb8UYcrpP8

Règles de base d’un bon sujet d’improvisations 

Si dans votre club, les membres redoutent et fuient la session d’improvisations, voici mes trois conseils pour les rendre plus intéressantes et amusantes.

Inspirez-vous d’événements du quotidien qui sont familiers à l’auditoire

Les membres pourront plus facilement raconter quelque chose sur des éléments ou des événements qui leur sont déjà connus. Évitez, cependant, les sujets d’ordre politique, religieux et sexuel. Il y a assez de thématiques dans notre quotidien qui méritent amplement leur place.

Proposez des sujets ludiques

Il a été maintes fois démontré que l’on apprend mieux en s’amusant. Favorisez donc le jeu. Récompenser le meilleur improvisateur à la fin de la réunion est une façon de “gamifier” la session. Et vous pouvez aller plus loin ! Par exemple, en proposant des sujets avec des jeux mots ou en cherchant des situations drôles et inhabituelles (évitez cependant les situations gênantes que l’on gardera pour les orateurs très expérimentés). Plus la séance sera amusante et plus vous obtiendrez de l’engagement de votre public.

  • Il m’est déjà arrivé de donner un biscuit chinois de la chance comme sujet pour l’improvisation d’un intervenant. A la fin de son discours, le participant suivant a dû coudre une histoire sur le mot dans le biscuit chinois – pendant que je le dégustais.
  • Dans un autre cas, je fais improviser le premier candidat sur une citation. A la fin de son intervention, le spectateur qui trouve de qui provient la citation peut designer le prochain « volontaire ». 

Testez les sujets

Mettez-vous à la place de l’orateur pendant un instant et demandez-vous si vous arriveriez à tisser une histoire dessus.

Pour vous aider, vous pouvez suivre ma check-list pour un super sujet d’improvisation :

  • Simple
  • Concis, pas plus de trois verbes d’actions dans le sujet
  • Parlant, donne assez d’éléments pour improviser
  • Ouvert, assez général pour ne pas restreindre
  • Ludique
  • Testé et approuvé

Formats d’improvisation 

Voici 5 formats de formats à apprivoiser dans vos réunions : Classique, Pecha Kucha, Mots-clés, Décrire sans utiliser des mots et Débat.

Classique  

Le meneur d’improvisations prépare ses sujets en fonction du thème de la soirée s’il y en a. Il peut proposer :

  • Une citation, par exemple : « D’après Oscar Wilde, le seul moyen de se délivrer de la tentation, c’est d’y céder »
  • Une situation ou un contexte, par exemple : « Vous êtes assis.e sur la terrasse d’un restaurant parisien, racontez ce que vous voyez. »
  • Un événement, par exemple : « Dans la jungle de Jumanji, vous vous êtes cassé une jambe et The Rock vous porte sur son dos. »
  • Un objet, par exemple : un stylo, une table, un miroir, un œuf…
  • Une image, photo ou peinture
  • Un début de phrase (souvent le mieux c’est respecter les règles d’une introduction impactante). Le participant doit répéter la phrase et continuer son histoire, par exemple : « Si l’océan meurt, nous mourrons… »
  • Une question : l’intervenant devra au cours de sa prise de parole répondre à la question. Exemple : La mode est-elle utile ? (à chaque fois que j’ai donné ce sujet, l’oratrice a remporté le titre de meilleure improvisation de la soirée)

Pour avoir d’autres inspirations, voici une liste de 50 idées de sujets ou cette liste de 365 questions.

Pecha Kucha 

A l’origine, Le Pecha Kucha ou Pecha Kutcha (du japonais ペチャクチャ : « bavardage », « son de la conversation ») est un format synchronisant une présentation orale à la projection de 20 diapositives se succédant toutes les 20 secondes, de préférence sans effets d’animations. Ce format a été inventé au Japon, par Astrid Klein et Mark Dytham (architectes installés à Tokyo), et popularisé en 2003, en réaction aux diaporamas interminables et ternes (provoquant ce qu’on appelle parfois “death by Powerpoint”). Ce format impose de l’éloquence, un sens de la narration, du rythme, de la concision, tout autant que de l’expression graphique. La présentation dure ainsi exactement 6 minutes et 40 secondes.

J’ai alors adapté ce format aux contraintes de 2 minutes de Toastmasters en réduisant le nombre à 5 diapositives.

Fonctionnement 

  1. Affichez la première diapositive
  2. Appelez un improvisateur
  3. Dès que celui-ci commence à parler, toutes les 20 secondes passez à la diapositive suivante

Mes conseils complémentaires pour ce format

  • Faites apparaître une pastille rouge à la dernière diapositive afin de signaler à l’orateur de la fin des diapositives de sa présentation, car ce dernier est souvent tellement absorbé par les diapositives qu’il en oublie de regarder le maître du temps !
  • Mettez une séparation claire entre deux sujets, afin que l’intervenant ne commence pas à faire une deuxième improvisation.

Mots-clés  

Le succès d’une présentation dépend énormément des mots que l’orateur choisit et de la façon dont il les utilise. Un discours impactant est souvent un discours qui contient des mots-clefs. Ce format incite l’intervenant à introduire des mots précis qui apportent de la valeur dans sa prise de parole.

Je me suis inspiré de l’expérience « Processador Humano », où le rappeur brésilien Emicida est invité à rapper en utilisant des mots qui apparaissent sur un moniteur provenant des spectateurs sur internet. Plus d’informations dans cette vidéo.

On prend le fonctionnement du Pecha Kucha vu plus haut et on remplace les images par des mots. Choisissez des mots faciles à comprendre, précis, descriptifs et courts. Ecrivez chaque mot sur une feuille. Il faut qu’ils soient lisibles à plus de 2 mètres de distance. Si vous utilisez un projeteur assurez-vous que le contraste est assez fort. Chaque intervention contient 5 mots/termes/expressions. Vous afficherez un mot toutes les 20 secondes. Pour plus d’aisance pour l’improvisateur, je vous conseillerais d’écrire un début de phrase dans la première feuille.

Fonctionnement 

  1. Affichez le premier mot
  2. Appelez un improvisateur
  3. Dès que celui-ci commence à parler, toutes les 20 secondes passez à la feuille suivante

Décrire sans utiliser des mots  

Vous est-il déjà arrivé de décrire un objet ou un service à quelqu’un qui ne comprenait aucun des termes que vous utilisez ? ou de chercher un mot spécifique sans jamais le trouver ou trouver un mot équivalent ? Eh bien, ce format vous permettra d’exercer votre capacité à rebondir et à associer des idées entre elles. Ce format est un peu l’inverse des mots-clefs, dans le sens où l’improvisateur ne doit utiliser aucun des mots que vous lui donnerez.

Exemple 

  • Essayez de décrire Facebook à votre grand-mère sans dire Réseaux social, amis, Mark Zuckerberg, messenger, mur, profil, fake news…
  • Essayez d’expliquer ce que fait Tesla à votre petit neveu sans parler de voiture autonome, Elon Musk, intelligence artificielle, détection d’obstacles…

Fonctionnement 

  1. Dites le sujet, la personne à qui l’improvisateur va parler et la liste des mots à ne pas utiliser
  2. Appelez l’improvisateur

Mes conseils complémentaires pour ce format

  • Si vous avez un projeteur vous pouvez l’utiliser pour mettre tous les mots dans une même diapositive. Cependant, je préfère tout dire à l’oral pour exercer la mémoire à court terme de l’improvisateur et de l’auditoire.

Un débat  

Dans notre vie de tous les jours, rares sont les fois où nous pouvons nous exprimer librement sur un sujet sans en être coupé ou interrompu, surtout lorsque le thème est objet à controverse. Le format débat permet à la fois d’exprimer son point de vue mais également d’adapter ce que l’on dit en fonction des arguments de la partie adverse. L’objectif est d’être le plus convaincant.

On peut également le faire pour un même sujet avec plus de personnes, on intervertira juste le passage entre POUR et CONTRE, ce qui permettra à chacun des camps de réfuter les arguments de la partie adverse.

Vous trouverez quelques exemples de sujets dans ce lien ou dans celui-ci.

Fonctionnement  

  1. Énoncez un sujet qui peut être répondu par POUR/CONTRE
  2. Appelez/Désignez un volontaire pour chaque camp
  3. Le premier improvise en défendant son point de vue
  4. Après l’improvisation du premier le deuxième répond